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25 Feb

En RDC, la vie sans Facebook, ou presque

Publié par SAIDICUS LEBERGER  - Catégories :  #RDC

FACEBOOK
FACEBOOK

En République démocratique du Congo, un mois après des manifestations meurtrières, plusieurs réseaux sociaux sont toujours inaccessibles, sur ordre du gouvernement. Mais les internautes, surtout accros à Facebook, trouvent des astuces pour contourner la mesure.

Si la plupart des internautes ont recours à des parades informatiques, qui diffèrent selon qu'ils habitent Kinshasa ou dans l'est du pays par exemple, d'autres, plus minoritaires, ont tout simplement appris à faire sans leur réseau social préféré.

"Jusqu'à ce jour, Facebook ne passe pas sur mon mobile, quelquefois Twitter passe", constate dépité Meni Mbugha. Ce styliste est un inconditionnel de Facebook mais, à sa grande surprise, il réalise qu'il a "survécu" sans ce réseau social, qui finalement le détournait un peu de ses cours de japonais.

Même son de cloche chez "Mimi", informaticien. "La vie sans Facebook a été difficile à gérer tout au début de la crise car j'avais pris l'habitude de publier mes poèmes et quelques pensées. Ça m'avait manqué".

"On se serait cru en Corée du Nord en plein centre de l'Afrique. Mais au fur et à mesure (...) j'ai pu renouer avec mes livres à mes heures perdues", ajoute-t-il.

Mais pour beaucoup, impossible de se passer de Facebook, très populaire dans le pays. "Sur mon laptop (ordinateur portable) j'utilise le navigateur Tor: il permet de masquer mon adresse IP (numéro d'identification d'un ordinateur, Ndlr) et de donner l'illusion que je suis dans un autre pays", permettant ainsi l'accès à Facebook, explique Patou, entrepreneur en informatique.

Une solution alternative qui n'est pas sans inconvénients. "C'est pas fluide et je ne travaille pas avec la même rapidité [qu'avant]. D'autre part, c'est pas parce que j'ai accès à Facebook que mon public aussi y a accès. Du coup, je n'atteins pas tout le monde..."

Du 19 au 22 janvier, des manifestations meurtrières avaient éclaté, à Kinshasa en particulier, et avaient fait entre 27 et 42 morts selon les sources.

Les manifestants dénonçaient un projet de loi électorale qui ouvrait la possibilité pour Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001, de se maintenir à son poste au-delà du terme de son mandat fin 2016, alors que la Constitution lui interdit de briguer un nouveau. Face à la contestation populaire, le pouvoir avait ordonné la coupure des SMS et aussi d'internet pour bloquer les réseaux sociaux.

- 'Casser le thermomètre' -

L'internet fixe a été de nouveau disponible après deux jours. Les SMS, moyen le moins cher pour communiquer, ont été rétablis le 7 février et, le lendemain, l'internet mobile a repris. Le 20 février, Twitter était accessible via certains opérateurs mais Facebook ou encore YouTube restent toujours hors-service.

"Il faut soit télécharger des applications compatibles et naviguer, soit il faut installer des programmes payant d'autres fournisseurs", dans un pays où la majorité de la population vit dans une grande pauvreté, renchérit Junior Safari, défenseur des droits de l'Homme de la Province Orientale (nord-est).

Alors que dans l'est, des internautes accèdent à Facebook et d'autres réseaux sociaux en se branchant sur des signaux du Rwanda et de l'Ouganda voisins, dans la capitale congolaise, plusieurs cyber-cafés contournent la coupure en usant de subterfuges.

"On est pénalisés!", se justifie Jean-Pierre, co-gérant d'un cyber-café. "La clientèle va sur Facebook, surtout les jeunes. Le chiffre d'affaire baisse alors on est obligés de charger des applications pour débloquer Facebook. Le site s'affiche comme sur le téléphone", montre-il sur un écran.

A Lubumbashi, deuxième ville du pays (sud-est), Timothée Mbuya, défenseur des droits de l'Homme, explique que la société civile avait un temps envisagé de "traîner en justice les fournisseurs d'internet (...) pour leur complicité avérée dans cette restrictions des libertés fondamentales".

A Kinshasa, Olivier blâme plutôt le gouvernement qui "cherche à casser le thermomètre pour espérer baisser la fièvre au lieu de soigner la cause". "C'est un signe d'intolérance et de dictature", conclut ce médecin peu fan des réseaux sociaux mais convaincu que leur coupure "rend les choses compliquées pour beaucoup".

Habibou BANGRÉ
AFP

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